Voici 10 livres sur Bruxelles à déguster cet été !
En cette période estivale, que vous fassiez le tour du monde, le tour de l’Europe ou le tour de la Belgique, je vous invite à faire également le tour de Bruxelles… par vos lectures ! Permettez-moi de vous proposer ma sélection, totalement subjective, de dix livres sur notre capitale à siroter sous votre paillote dans les semaines à venir. BD, roman, nouvelle, récit, essai, guide, catalogue, toutes les époques, toutes les singularités, toutes les facettes de notre capitale y sont abordées de toutes les manières, impliquant parfois des personnages aussi romanesques que Charlotte Brontë, Arthur Rimbaud ou Paul Verlaine. Et précisons que cette prose est due à une grande majorité d’autrices. Faites vos jeux !
A tout seigneur, tout honneur, commençons par Patrick Weber qui signe une superbe BD intitulée Ommegang 1930 aux Editions Anspach. Cet opus, richement illustré par le dessinateur Thomas Liera, est la « BD officielle » de l’Ommegang (qui aura lieu, cette année, les 2 et 4 juillet). L’intrigue, mêlant patrimoine et suspense, plonge le lecteur à l’époque de la reprise de l’événement en 1930. Mais n’en disons pas plus. A vous de percer le mystère de l’Ommegang 1930…
Qui ne connaît pas les sœurs Brontë ? Particulièrement, Emily avec Les Hauts de Hurlevent et Charlotte avec Jane Eyre sont mondialement célèbres. Par contre, peu de gens savent qu’Emily et Charlotte ont séjourné à Bruxelles à partir de 1842. Le pensionnat qui les hébergeait était situé à l’emplacement actuel du Palais des Beaux-Arts. Il est permis d’affirmer que l’expérience acquise durant leur séjour bruxellois eut une influence importante sur leurs œuvres respectives, notamment pour Charlotte qui demeura deux ans dans la capitale de la jeune Belgique. Pour vous en convaincre, je vous encourage à découvrir le livre de l’écrivaine britannique Helen MacEwan, Bruxelles. De la Rue Isabelle à Bozar, aux Editions Samsa. Pour tout savoir sur le parcours bruxellois de Charlotte Brontë. Un récit passionnant…
Et quelques années plus tard, précisément le 10 juillet 1873, toujours à Bruxelles, Paul Verlaine tente d’assassiner Arthur Rimbaud, dans un hôtel de la Rue des Brasseurs, en tirant sur lui avec le revolver de poche qu’il vient d’acheter chez l’armurier Montigny au numéro onze de la Galerie de la Reine. Le magistrat liégeois François Swennen retrace à sa manière cet épisode mémorable de l’histoire de la poésie française dans son roman Rimbaud/Verlaine-Une affaire insolite. Vous lirez d’une seule traite cette captivante nouvelle éditée par Cohen & Cohen…
Mais quittons le 19e siècle pour nous plonger dans le grand bain du 20e siècle. L’action de 33, Place Brugmann, paru au Seuil, se déroule durant la Seconde Guerre mondiale au cœur d’Ixelles. En fait, ce premier roman de la réalisatrice et dramaturge américaine Alice Austen raconte une histoire peu banale. Ce livre, qui commence en 1939, décrit les états d’âmes de différents habitants de l’immeuble du 33 Place Brugmann face aux occupants nazis. Comme l’a écrit Guy Duplat dans La Libre Belgique, cet opuscule trouve une résonance particulière à l’heure où Trump menace la démocratie américaine. A vous de confirmer…
Passons maintenant aux guides et commençons par le catalogue d’une magnifique expo qui a lieu, en ce moment, dans le cadre de l’Année de l’Art Déco, près du Royal Léopold Club à Uccle. Il s’agit bien sûr de l’exposition Around Art Déco, organisée par le Musée van Buuren et dédiée aux sculptures de l’Entre-deux-guerres. Cet ouvrage collectif, dû notamment à Eric Hennaut, à Manon Magotteaux et à Werner Adriaenssens, présente, de manière remarquable, les œuvres qui sont exposées dans les jardins ainsi que dans la maison et qui sont dues aux plus grands artistes de l’époque : Oscar De Clerck, Idel Ianchelevici, Oscar Jespers, Aristide Maillol, Constant Permeke, Philippe Wolfers, Ossip Zadkine… Rappelons que l’institution muséale du 41 de l’Avenue Léo Errera fête également cette année les cinquante ans de son ouverture au public…
Après les années 30, voici les années 80. Aux nostalgiques de cette période, je conseille la lecture de Bruxelles 80 d’Yves Ringer (180° Editions). Ce livret fait résonner tous ces lieux qui ont égayé les Bruxelloises et les Bruxellois il y a plus de 40 ans. Pour mettre l’eau à la bouche de nos « papys flingueurs », citons quelques établissements nocturnes qui sont évoqués dans ce guide rétroactif : Le Black Bottom, Le Canotier, Le Circus, La Gaîté, Le Garage, Le Klacik… En réalité, au travers de ce petit voyage dans le temps, l’auteur nous montre à quel point Bruxelles et le monde ont changé depuis ce temps béni…
Et puis, à moins de dix kilomètres de la Grand-Place de Bruxelles, s’étend une des plus belles et une des plus vastes forêts périurbaines d’Europe : la Forêt de Soignes. Trop souvent méconnue dans sa profondeur historique et écologique, elle fait enfin l’objet d’un guide, aussi documenté qu’accessible, à l’initiative des Editions Aparté. Sous la plume d’Isabelle Douillet-De Pange et sous l’objectif d’Alain Robyns, cette publication se distingue par sa double approche : elle est à la fois guide pédagogique pour comprendre l’histoire, la nature, l’environnement et guide de promenades pour envisager plus de vingt balades, à pied ou à vélo, en forêt. De toute façon, il s’agit d’une lecture indispensable avant de se rendre dans la Forêt de Soignes…
Mais il n’y a pas que la Forêt de Soignes à découvrir dans Bruxelles et alentours ; il y a aussi l’architecture, et pourquoi pas, le modernisme. A cet effet, je ne peux que vous conseiller de dévorer le fantastique travail de Jacinthe Gigou, Bruxelles moderniste, aux Editions Racine. Notre historienne de l’art et de l’architecture signe, en effet, un ouvrage magistral sur les évolutions de ce mouvement architectural, offrant les clés pour apprécier pleinement cette esthétique novatrice. En exclusivité, je vous livre ici les cinq plus beaux immeubles modernistes de bureaux à Bruxelles selon Jacinthe : l’ancienne Banque Lambert (aujourd’hui ING) de Gordon Bunshaft, le Rectorat de la VUB de Renaat Braem, le Glaverbel d’André Jacqmain, le CBR de Constantin Brodzki et la Royale Belge de Pierre Dufau. By the way, dans cette liste prestigieuse, trois bâtiments se trouvent dans la même commune. A vous d’identifier ce périmètre doré du modernisme bruxellois…
Ceci étant dit, le modernisme n’exclut pas l’amour. Dans Bruxelles Love (paru chez 180° Editions), Kate Milie nous offre un petit bijou en nous livrant soixante lieux romantiques à Bruxelles, alliant hôtels glamour, cimetières légendaires, coins charmants et détours charmeurs, promenades insolites, bancs publics et même… réverbères. Cette autrice prolifique nous fait (re)découvrir le patrimoine amoureux de la capitale, de la Taverne de l’Espérance aux Galeries Saint-Hubert en passant par le Pavillon des Passions Humaines, le Cimetière de Laeken, le Musée des Horloges, la Maison Cauchie et l’Hôtel Le Berger. Sans oublier bien sûr la Maison van Buuren qui met en évidence plus de trois décennies de raffinement, de complicité, de passion pour l’art, de mécénat incarnés par David et Alice van Buuren…
Last but not least, terminons par mon coup de cœur, à savoir le guide-roman de Daphné Tamage sur Bruxelles, paru aux Editions L’Arbre qui marche, dans la collection « Premier voyage ». En réalité, au travers de cette autofiction, notre jeune autrice belge, finaliste du Prix de Flore 2024, rend un bel hommage au plus bruxellois des Bruxellois, en l’occurrence Marc Danval dont les chroniques radiophoniques nous manquent tellement. L’écrivaine y décrit la ville de sa naissance avec toute la sensibilité et toute la distance nécessaire. Ses promenades sont à l’image de Bruxelles, cosmopolites, « zwanzeuses », peuplées de monuments et sites qui ont échappé à la « bruxellisation » et au façadisme. Comme l’a si bien souligné Jean-Claude Vantroyen dans Le Soir, Daphné Tamage porte sur Bruxelles un regard bien singulier, ce qui fait le charme et le caractère de sa démarche. Il ne tient qu’à vous de vous laisser guider…
Paul Grosjean
Chroniqueur historique
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